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09

MAI

2020

Interview de Mme. Martine BLOCH, orthophoniste depuis 39 ans et musicothérapeute depuis 7 ans qui exerce actuellement en EHPAD

POURQUOI M’ETRE FORMEE A LA MUSICOTHERAPIE ? 

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Quelquefois dépassée par certains cas auxquels des techniques orthophoniques classiques n’apportaient plus rien, j’ai été amenée à utiliser la musique de façon intuitive, sans protocole particulier. Très vite j’ai pu observer des bénéfices pour le patient en termes d’humeur et de motivation. J’ai souhaité en savoir davantage afin d’exploiter au mieux les spécificités de la musique au sein de mes séances. 

LA MUSICOTHERAPIE BENEFICIE-T-ELLE DE VALIDATION SCIENTIFIQUE ? 

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En France ces 25 dernières années, des neuroscientifiques comme Emmanuel Bigand, Hervé Platel, Barbara Tillmann, et bien d’autres se sont beaucoup intéressés aux effets des composantes de la musique sur le cerveau. Les études foisonnent tendant à mettre en évidence une importante réactivité du cerveau aux stimulations musicales et de nombreux chevauchements anatomiques et fonctionnels entre les traitements musicaux et des compétences non musicales (linguistiques, motrices et émotionnelles notamment). D’autres études tentent d’expliquer les effets bénéfiques de transfert de la pratique ou de l’écoute musicale sur la cognition et la motricité, chez des sujets sains ou pathologiques. 

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La revue Cochrane a publié de nombreuses études tendant à répertorier les effets de la musicothérapie.

QUEL EST L’INTERET POUR L’ORTHOPHONISTE D’UTILISER DES TECHNIQUES DE MUSICOTHERAPIE OU DES SUPPORTS MUSICAUX DANS SES SEANCES.?

 

Il n’est pas indispensable d’avoir une formation de musicothérapeute ni de musicien chevronné pour intégrer du matériel musical au sein de ses séances d’orthophonie. Bien sûr c’est un plus. Il suffit d’aimer chanter, d’avoir le sens du rythme et de l’exploiter par l’utilisation des percussions, se servir de paroles de chansons, l’imagination n’ayant pas de limite. 

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La musique, par ses effets positifs démontrés sur l’humeur et la motivation, facilite la mise en œuvre et l’acceptation des techniques d’orthophonie, leur conférant une dimension ludique. 

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Les actions de la musique sur le fonctionnement cérébral, à même de potentialiser l’efficacité des techniques orthophoniques sont nombreuses. La musique favorise notamment la plasticité cérébrale, améliore les habiletés perceptives, exerce un effet facilitateur dans le traitement de stimuli linguistiques, réactive la mémoire épisodique et sémantique. 

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Je vous recommande la lecture de l’article très documenté des neuroscientifiques et musiciens Aline Moussard, Françoise Rochette et Emmanuel Bigand qui vous convaincront d’envisager la musique comme une composante indispensable dans votre pratique professionnelle. 

Exemple n°1 d’utilisation des techniques de musicothérapie active avec une population âgée souffrant de troubles d’origine neurologique. 

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PRATIQUE DES PERCUSSIONS INSTRUMENTALES

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Cette technique a pour vocation d’inviter le participant à s’impliquer corporellement. 

La manipulation des instruments permet la mobilisation des doigts, des mains, des poignets et des bras et favorise la coordination, l’indépendance des mains, et des membres supérieurs, contribuant à retarder l’apparition des apraxies. Mais l’utilisation des percussions peut être le prétexte à de nombreux exercices sollicitant les fonctions cognitives. Le rythme délimite et structure le temps, marquant le début et la fin d’une période. 

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L’attention est sollicitée par des exercices d’écoute. La mémoire à court terme est sollicitée pour la répétition de séquences rythmiques et mélodiques de plus en plus longues sur le modèle des empans de chiffres. 

Traiter une information, comme par exemple retenir une séquence mélodique ou rythmique, la reproduire à l’envers ou la chanter, compter les pulsations d’un rythme, réclame la participation de la mémoire de travail. 

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La mise en jeu des fonctions exécutives est nécessaire pour la création d’une séquence rythmique ou mélodique qui suppose la participation d’un processus d’élaboration complexe. Il s’agit de vouloir, de se définir un but, de choisir une stratégie, de la mettre en œuvre, de l’analyser et de l’améliorer. 

Mémoriser et rejouer en boucle un motif rythmique ou mélodique mobilisent les processus attentionnels. 

 

La pratique des percussions instrumentales joue également un rôle dans la socialisation. Jouer ensemble, c’est aussi tenir compte de l’autre et c’est se positionner dans le groupe. L’expression et l’estime de soi sont favorisées. La créativité se libère par le jeu de l’improvisation.

COMMENT DEVIENT-ON MUSICOTHERAPEUTE EN FRANCE ET QUELLE EST LA RECONNAISSANCE INSTITUTIONNELLE ? 

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En France le métier de musicothérapeute ne bénéficie d’aucun statut légal. Cependant des professionnels en recherche de reconnaissance et de sérieux professionnel se sont constitués en « Fédération Française de musicothérapie » et ont élaboré une fiche métier

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Il existe de nombreux centres de formation privés ou universitaires. Chacun possède ses propres particularités, ses orientations d’enseignement et ses exigences d’admissibilité qui ne sont pas cadrées par la loi. Ces centres délivrent des DU ou Master pour l’obtention desquels un mémoire de fin d’études est exigé. Ces formations s’adressent, entre autres, à des professionnels de santé et du secteur psycho-social maîtrisant la pratique d’un instrument de musique, la voix en faisant partie.

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EN QUOI CONSISTE UNE PRISE EN CHARGE EN MUSICOTHERAPIE ? 

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Elle commence toujours par un entretien permettant de construire l’anamnèse, suivi de la réalisation du bilan qui aboutira à l’élaboration du projet en musicothérapie. 

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Il existe différentes techniques de musicothérapie, La musicothérapie est dite « active » lorsqu'elle propose des dispositifs de travail thérapeutique privilégiant la production sonore et musicale, l’improvisation, la créativité. Les éléments musicaux (rythme, son, timbre, intensité) sont utilisés afin de permettre à la personne de s'exprimer et de communiquer. La musicothérapie est dite « réceptive » lorsqu'elle propose, au sein d’une relation thérapeutique, des dispositifs fondés sur l'écoute. 

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Mais chaque musicothérapeute est libre d’utiliser son imagination pour créer des activités musicales adaptées à la pathologie et à la personnalité du patient dans le respect des objectifs à atteindre. 

L’adhésion au traitement par le patient est indispensable. 

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Historiquement la pratique de la musicothérapie s’est développée au sein des hôpitaux psychiatriques. Mais aujourd’hui son domaine d’application est très large. De la périnatalité à la gériatrie en passant par les déficiences sensorielles et intellectuelles, les troubles du spectre autistique, les troubles du langage, la liste n’étant pas exhaustive. 

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La musicothérapie peut se pratiquer en séance individuelle ou en groupe.

POUR QUELS TYPES DE PRISE EN CHARGE ?

 

La surdité, la dyslexie, les troubles du langage oral, les maladies neurodégénératives (Maladie de Parkinson, Maladie d’Alzheimer, démence à corps de Lévy...), les troubles du spectre autistique. 

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Exerçant en EHPAD mon expérience se limite à la prise en soin des maladies neurodégénératives. 

Exemple n°2 d’utilisation des techniques de musicothérapie active avec une population âgée souffrant de troubles d’origine neurologique. 

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ECOUTER ET CHANTER DES CHANSONS POPULAIRES

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Chanter agit de façon favorable sur l’humeur du patient, le plaçant ainsi dans des conditions optimisées pour participer aux exercices proposés.

 

Leur contenu est susceptible de reconnecter les participants avec leur passé culturel et personnel. Les paroles sont le point de départ de nombreux exercices de langage, fluence verbale, sollicitation de la mémoire sémantique et épisodique.... 

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Chanter peut aussi être un prétexte pour travailler le souffle, la prosodie, la projection vocale, la maîtrise de l’intensité des productions vocales, l’articulation et les praxies bucco-faciales dans la maladie de Parkinson. 

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